Published on May 17, 2024

Contrairement à la croyance populaire, la retraite n’est plus une fin de carrière, mais le début d’un projet de vie de 30 ans qui exige une véritable stratégie.

  • L’allongement de l’espérance de vie rend le modèle de la retraite à 65 ans financièrement et personnellement obsolète au Québec.
  • Le succès de cette nouvelle étape repose sur la synchronisation de trois capitaux : financier, santé et sens.

Recommandation : Abordez votre planification non pas comme une simple épargne, mais comme le plan d’affaires de votre “seconde carrière” : une vie longue, active et pleine de projets.

L’idée de la retraite a longtemps été associée à une ligne d’arrivée bien méritée autour de 65 ans. Mais un constat s’impose à de plus en plus de Québécois dans la cinquantaine et la soixantaine : et si cette ligne d’arrivée n’était en fait que le point de départ d’une nouvelle course de fond de 25, voire 30 ans ? L’espérance de vie augmente, et avec elle, une question à la fois exaltante et angoissante : comment vais-je financer et, surtout, comment vais-je *vivre* ces trois décennies supplémentaires ? Beaucoup pensent qu’il suffit de faire un budget et de diversifier ses placements, mais ces conseils génériques ignorent la dimension la plus cruciale de cette nouvelle réalité.

La vérité, c’est que la longévité a transformé la retraite en un véritable projet de vie, presque une seconde carrière. Elle ne peut plus être abordée avec les outils d’hier. L’enjeu n’est plus simplement d’accumuler un capital pour “arrêter de travailler”, mais de structurer une existence riche, active et pleine de sens, tout en s’assurant que les ressources financières suivront le rythme. La véritable clé n’est pas de gérer la fin, mais de concevoir un tout nouveau chapitre. C’est une immense opportunité de se réinventer, à condition d’en devenir l’architecte.

Cet article n’est pas un guide de plus sur l’épargne. C’est une feuille de route pragmatique et motivante pour vous aider à bâtir cette retraite-projet. Nous allons déconstruire les mythes, vous donner les outils québécois pour calculer vos besoins réels, explorer des stratégies pour rester actif et pertinent, et vous montrer comment orchestrer les piliers de votre bien-être pour les 30 prochaines années.

Pour naviguer efficacement à travers cette nouvelle réalité, il est essentiel de comprendre les différentes facettes de la planification d’une retraite prolongée. Ce guide est structuré pour vous accompagner pas à pas, de la prise de conscience financière à la construction d’un quotidien épanouissant.

Pourquoi la retraite à 65 ans est devenue inadaptée à l’espérance de vie québécoise ?

Le modèle de la retraite à 65 ans a été conçu à une époque où l’espérance de vie dépassait à peine cet âge. Aujourd’hui, un Québécois de 65 ans en bonne santé a toutes les chances de vivre jusqu’à 85, 90, voire 95 ans. Cette longévité, une formidable nouvelle en soi, fait voler en éclats le paradigme traditionnel. Financer 5 à 10 ans de repos est une chose ; financer 25 à 30 ans d’une vie active en est une autre. Ce décalage crée une béance entre les attentes et la réalité, un angle mort que beaucoup découvrent tardivement. Le problème n’est pas seulement financier, il est aussi psychologique et social.

La société est encore largement structurée autour de cette fin de carrière à 65 ans, laissant peu de place à ceux qui souhaitent ou doivent rester actifs plus longtemps. Cette inadéquation est si profonde que de nombreux futurs retraités se sentent démunis. En effet, des données récentes montrent que près de 50 % des Québécois ne planifient pas leur retraite, et une étude de Retraite Québec révèle que 62 % des travailleurs québécois affirment avoir besoin d’accompagnement pour cette transition. Ce chiffre illustre parfaitement que les vieux réflexes ne suffisent plus. Il faut une nouvelle approche, un “plan d’affaires” pour cette seconde vie.

La première étape de ce plan consiste à cesser de voir la retraite comme une destination et à la considérer comme un projet à long terme. Cela implique de faire un bilan lucide de sa situation et de commencer à poser les fondations d’une stratégie adaptée non pas à l’âge de votre passeport, mais à votre espérance de vie réelle et à vos ambitions. Il s’agit de reprendre le contrôle en se dotant des bons outils et de la bonne mentalité.

Votre plan d’action pour amorcer la planification

  1. Évaluation financière : Utilisez l’outil SimulRetraite de Retraite Québec pour obtenir une première estimation de vos besoins financiers réels basée sur vos données.
  2. État des lieux des régimes : Vérifiez votre état de participation détaillé au RREGOP ou à tout autre régime de retraite public ou privé auquel vous cotisez.
  3. Scénarios personnalisés : Contactez les ressources humaines de votre employeur pour demander des simulations de retraite personnalisées (arrêt complet, progressif, etc.).
  4. Validation stratégique : Consultez un planificateur financier indépendant pour valider votre stratégie de décaissement et d’investissement à long terme.
  5. Exploration de la flexibilité : Renseignez-vous activement sur les options de retraite progressive ou de transition de carrière offertes au sein de votre organisation.

Comment calculer le montant réel dont vous aurez besoin for 30 ans de retraite au Québec ?

L’une des plus grandes angoisses face à une retraite de 30 ans est l’incertitude financière. La question “combien me faut-il ?” est sur toutes les lèvres. La réponse classique du “70 % de votre dernier salaire” est dangereusement simpliste. Elle ne tient pas compte de l’évolution de vos projets, de votre santé ni de l’érosion de votre pouvoir d’achat sur trois décennies. La première étape d’un calcul réaliste consiste à ne pas penser en termes de revenu de remplacement, mais de coût de vie projeté. Il faut architecturer le budget de votre future vie.

Divisez mentalement votre retraite en trois phases : la phase “Go-Go” (65-75 ans), où vous êtes actif, voyagez et dépensez le plus ; la phase “Slow-Go” (75-85 ans), où le rythme ralentit mais où les frais de santé peuvent commencer à augmenter ; et la phase “No-Go” (85 ans et plus), où les dépenses sont principalement liées aux soins et au confort. Estimer vos dépenses pour chacune de ces phases vous donnera une image beaucoup plus précise que n’importe quelle règle de pouce. N’oubliez pas d’inclure un budget pour les imprévus et, surtout, pour les projets qui donneront un sens à ces années. C’est ce que j’appelle votre “inflation personnelle” : l’augmentation de vos dépenses liée non seulement au coût de la vie, mais aussi à vos ambitions.

Gros plan sur des mains calculant un budget de retraite avec documents financiers épurés
Written by Marc Gagnon, Marc Gagnon est conseiller en développement économique régional depuis 16 ans, titulaire d'un MBA de HEC Montréal et d'une formation en développement territorial, actuellement directeur du développement économique dans une municipalité régionale de comté des Cantons-de-l'Est. Il accompagne les entrepreneurs et PME manufacturières dans leur croissance, leur accès au financement et leur transition écologique.